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La bataille du rail en Asie, nouveau chapitre de la confrontation sino-japonaise

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Narendra Modi et Shinzo Abe lors d’une rencontre à Tokyo en 2014

Le 15 septembre dernier, Narendra Modi, premier ministre indien, et son homologue japonais Shinzo Abe, inauguraient la construction de la première ligne train à grande vitesse en Inde, qui doit relier Ahmedabad à Bombay d’ici 2024. Ce chantier, gagné aux dépens de la Chine, revêt une saveur particulière pour les japonais dans un contexte actuel de bataille du rail en Asie. 

En effet, Shinzo Abe déclare que ce train « marque le début d’un nouveau chapitre des relations entre l’Inde et le Japon ». Il témoigne ainsi d’une forte volonté de coopérer, puisque le Japon finance le projet à hauteur de 80% par un prêt au taux particulierement faible de 0,1%. Le pays ayant mis au point le TGV Shinkansen dès 1964, et possédant par ailleurs le train le plus rapide du monde (le SCMaglev), apporte en outre une expertise technique de poids aux ingénieurs indiens. Ces derniers font face au défi crucial de la modernisation des infrastructures de transports pour maitriser un vaste territoire dont l’économie est en pleine émergence. Cependant, Narendra Modi résume parfaitement la portée de ce contrat : « Le partenariat entre l’Inde et le Japon est spécial, stratégique et global ». Il fait ainsi directement référence à l’axe Bombay-Tokyo naissant, qui entend s’opposer à l’initiative One Belt One Road (OBOR) du dragon chinois.

La technologie de pointe japonaise s’est en effet retrouvée plusieurs fois rejetée au profit de l’émergent chinois lors de nombreux appels d’offre en Asie du Sud-Est. La maitrise technique chinoise impressionne d’autant plus depuis cette année avec la création de son propre TGV. China Railway gère ainsi la réalisation de lignes entre Kunming (Yunnan) et le Laos, puis de Bangkok (Thaïlande) à la frontière laotienne, et enfin de la frontière thaïlandaise à Port Klang (Malaisie), dans l’optique d’accroître le commerce dans le corridor Chine – Indochine de l’initiative OBOR. Si ces divers projets ne sont pas encore reliés les uns aux autres, l’objectif à terme est de créer une ligne rapide entre la Chine et Singapour. Cependant cette coopération économique sert également les ambitions géopolitiques de la Chine : elle souhaite s’imposer en tant que leader régional, en particulier en Asie du Sud-Est. Or cette volonté hégémonique inquiète tant l’Inde, qui convoite l’Asie du Sud-Est pour sa propre sphère d’influence, que le Japon. Ces derniers multiplient dès lors les témoins de coopération.

La Chine entend donc faire du rail un symbole de son ascension et de sa victoire sur le Japon et l’Inde, dans le domaine technologique comme géopolitique. Rien d’étonnant à ce que ces deux Etats s’associent alors pour contester la montée en puissance chinoise. Par conséquent, cette bataille du rail en Asie illustre autant la lutte acharnée que se livrent japonais et chinois pour le leadership régional, que le rôle croissant dévolu à l’Inde. L’annonce indo-japonaise du programme Asian African Growth Corridor pour concurrencer la One Belt One Road chinoise s’inscrit d’ailleurs dans cette compétition, dans laquelle le rail joue et jouera un rôle majeur.

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